Le message des barrios de Comuna 13

 

A l’ouest de la ville de Medellín,  se trouve la Comuna 13, un secteur déprimé composé de vingt-deux quartiers (barrios).

 

Agrippée sur les pentes d’une montagne escarpée, zébrée de sentiers, d’escaliers abrupts,  de ruelles étroites et d’obscurs recoins, ce véritable labyrinthe abrite deux cent mille habitants originaires, pour la plupart, du nord du pays.

 

Des pauvres, victimes de l’exclusion sociale, rejetés dans l’économie informelle, mais avec une grande capacité d’organisation communautaire et un sens affirmé de leurs revendications.

 

J'ai rendez-vous au Toucan Café, point de départ d'une journée entièrement dédiée à leur rencontre et placée sous le signe du street-art.

 

 

 

 

 

Tout à commencé dans les années 1970, lorsque les paysans de la région, chassés par la misère et la violence engendrées par le conflit entre les guérillas et le gouvernement, sont venus chercher refuge à la ville.

 

Fondée au XVIIe siècle par les conquérants espagnols dans la vallée andine de l’Aburrà, coincée à plus de 1 500 mètres d’altitude entre les cordillères centrale et occidentale, Medellin, "Cuidad de la Eterna Primavera" (la ville de l’éternel printemps ), n’a alors que peu à offrir à ces masses miséreuses qui prennent d’assaut les pentes de ses collines.

 

Des milliers de familles déracinées s’entassent alors dans les « barrios », ces bidonvilles qui poussent comme des champignons vénéneux, terrain propice aux violences et trafics en tous genres.

 

L’inaction des pouvoirs publics laisse le champ libre aux mafias du narcotrafic et aux mouvements de guérillas qui se disputent le terrain et prospèrent sur la misère.

 

 

 

 

Dans les années 1980, Pablo Escobar, baron du tristement célèbre « cartel » de Medellín, contrôle, grâce à l’argent de la drogue et à ses "sicarios" (tueurs à gages), une large partie de la ville.

 

Résultat : au début des années 1990, dans un pays gangrené par la pauvreté, la violence et la corruption, le taux annuel d’homicide atteint alors le niveau record de 400 meurtres pour 100 000 habitants sur une population totale de 2,5 millions d’habitants. Une véritable hécatombe !

 

Medellín se voit attribuer le titre peu glorieux de "capitale du crime" et Comuna 13 celui de "barrio le plus dangereux de la ville" ...

 

 

Les choses vont changer au tournant des années 2000, lorsque l’armée, soutenue par les milices privées, décide de reprendre la main.

 

Il faudra plus de six assauts pour déloger les guérilleros de leur bastion.


En 2002, une d
ernière intervention, baptisée "Orion" : plus d’un millier de soldats et 400 paramilitaires, appuyés par des hélicoptères, investissent  le quartier.

 

Après deux jours de combat, près de 80 morts et  plus de 300 disparus... ils parviennent à en reprendre le contrôle.

Un nom qui est sur toutes les lèvres quand on évoque la renaissance de la ville, celui de Sergio Fajardo. Élu maire en 2003, cet universitaire charismatique va impulser un projet de développement urbain proprement révolutionnaire visant à désenclaver les « comunas ».

 

 

La première étape consiste à doter Medellín d’un réseau de transports digne de ce nom. Une ligne de métro, deux lignes téléphériques complémentaires pour mieux relier les quartiers pauvres des collines au centre-ville, suivi en 2004 de la ligne K de MetroCable qui dessert Santo Domingo, ex-fief de Pablo Escobar, et qui fait aujourd’hui la fierté de la population. Plus besoin, pour les habitants, de descendre ou de monter des milliers de marches pour rallier la station la plus proche d’Acevedo.

 

Désormais, pour moins d’un euro le trajet, le téléphérique permet de parcourir la distance en une dizaine de minutes et en toute sécurité. À l’ombre des télécabines, la vie reprend peu à peu ses droits et le quartier, qui faisait hier encore figure de coupe-gorge, est devenu un lieu d’attraction donné en modèle aux visiteurs étrangers.

 

Des actions privées également comme le collectif Casa Kolacho dont un membre nous guide aujourd'hui dans ce barrio, ont influencé la transformation sociale du quartier en habillant les murs  de fresques colorées magnifiques.

 

- « Nos armes à nous, ce sont les bombes… de peinture !"   lâche notre guide dans un sourire.

- "Aujourd'hui les habitants sont fiers de ces œuvres mais ce fut un sacré défi à mettre en place, quant au  début nous avons initiés les premiers graffitis, les gens se barricadaient chez eux, ils prenaient les aérosols pour des armes !"

 

Notre petit groupe continue la visite du barrio passant d'une œuvre à une autre, une histoire cachée derrière chacune d'elle. Les façades des maisons aussi ont prit des couleurs, même les toits, et toute une petite économie basée sur le tourisme est en train de naître.

 

 

Casa Kolacho revendique à lui seul plus de 90% du street art que l'on peut admirer à  Comuna 13. Ce collectif local est porteur  d'un message de paix et d'espoir, véhiculé par l'Art : le hip hop, les graffitis, la breakdance and DJ’ing.

 

Ils opèrent sans aide du gouvernement et sous forme de volontariat au profit de programmes socio-culturels visant les  plus jeunes et les plus défavorisés du barrio.

 

- "L’art, la culture, l’éducation sont les seuls vrais moyens pour résister à la violence, changer les mentalités et impulser un changement" conclura notre guide en nous tendant une  bombe aérosol.

 

Il nous invite, maintenant que nous connaissons l'histoire de Comuna 13 et de Medellín, à réaliser à notre tour notre premier graffiti....  et esquisser comme ils ont su le faire,  un  message d'amour et d'espoir vers l'avenir.

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Commentaires: 1
  • #1

    BANDESAPT ELISE (mercredi, 20 septembre 2017 13:11)

    tu trouves toujours les mots justes pour décrire découvrir un pays un paysage une image ou des personnes ...
    je te tire mon chapeau et je voyage toujours autant avec tes paroles et tes images
    je te bise